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Burkina Faso: Sécurité alimentaire - Quand le PAPSA apprend à pêcher aux paysans

Plus de deux ans après la mise en œuvre du Projet d’amélioration de la productivité agricole et de la sécurité alimentaire (PAPSA), ses acteurs ont entamé le processus de sa revue à mi-parcours. Cela leur a permis de toucher du doigt les réalisations sur le terrain, de rencontrer les producteurs et les structures d’appui, de faire ressortir les points forts et les insuffisances de l’exécution du projet afin d’en tirer les leçons nécessaires pour améliorer celle-ci.

Dans ce cadre, des missions conjointes ont sillonné tout le Burkina sur 5 axes, du 9 au 13 juillet 2013. L’équipe qui a parcouru l’axe 4 a séjourné dans les régions des Hauts-Bassins et de la Boucle du Mouhoun. Nous étions de la partie.

Le Projet d’amélioration de la productivité agricole et de la sécurité alimentaire (PAPSA) est un projet national de plus de 26 milliards de nos francs, financé par la Banque mondiale (20 milliards F CFA), l’Etat burkinabè (2,3 milliards F CFA) et les bénéficiaires (3,3 milliards F CFA).

Il s’inscrit en droite ligne dans la Stratégie de croissance accélérée de développement durable (SCADD) en ce qu’il vise à lutter contre la pauvreté en donnant les moyens (outils de production, conseils et accompagnement) aux petits exploitants vivriers pour qu’ils accroissent leur productivité dans les secteurs agricole, animal et forestier.

Présentant le PAPSA, son coordonnateur national, Jean Martin Kambiré, a déclaré qu’il œuvrait à apporter « un appui aux petits producteurs afin de leur permettre d’accroître les productions vivrières à travers l’amélioration de la productivité et à rendre ces produits disponibles sur le marché durant toute l’année.

En résumé, le PAPSA vise à renforcer la sécurité alimentaire des ménages mais aussi de tout le Burkina Faso ». Les activités du projet tournent autour de trois axes : l’amélioration de la production, l’amélioration de la disponibilité des produits alimentaires et le développement institutionnel et le renforcement des capacités.

Jean Martin Kambiré a indiqué que la première composante du projet porte sur l’appui à l’augmentation de la production agro-sylvo-pastorale.

Les principales activités concernent les travaux communautaires (aménagement des bas-fonds et de sites antiérosifs, construction de fosses fumières, la réhabilitation des aires protégées pour le développement de la faune et du tourisme cynégétique et de vision), les activités génératrices de revenus comme l’élevage porcin et de la volaille, etc.

La seconde composante est l’appui à l’amélioration de la disponibilité des produits agricoles sur le marché. Le coordonnateur du PAPSA a expliqué que dans ce volet il y a les activités de réduction des pertes après les récoltes à travers la distribution des sacs triple-fond pour la conservation du niébé par exemple, mais aussi du matériel adéquat pour la collecte et la conservation du lait frais.

Les dons de presse à karité et les ruches kenyanes participent à l’exploitation judicieuse des produits forestiers non ligneux.

Toujours dans ce volet, il y a l’appui à la commercialisation des produits vivriers à travers la diffusion de l’information sur les marchés afin de renseigner en temps réels les producteurs sur les prix pratiqués dans les différentes localités du pays ; c’est aussi l’établissement d’un système de warrantage dans les zones excédentaires et la réhabilitation des banques de céréales en coopératives de commercialisation des céréales dans les zones déficitaires du Burkina Faso.

La dernière composante met l’accent sur le développement et le renforcement des capacités des structures publiques et privées intervenant dans la mise en œuvre du projet, des producteurs et des organisations paysannes, c’est aussi la gestion et le suivi-évaluation du projet.

Après donc plus de deux ans d’exécution, la revue à mi-parcours du PAPSA s’imposait. Celle-ci a été menée conjointement par les différents partenaires du projet. Cette revue comporte une sortie de terrain pour aller à la rencontre des producteurs et toucher du doigt les réalisations. Dans ce sens, 5 équipes ont sillonné le pays sur cinq axes couvrant l’ensemble des 13 régions du Burkina.

Ainsi, les régions des Hauts-Bassins et de la Boucle du Mouhoun ont constitué le chemin de l’axe 4. L’équipe qui a été dans cette partie du Burkina était conduite par le coordonnateur national du PAPSA, Jean Martin Kambiré, et le Chargé d’Opérations à la Banque mondiale-Burkina Faso, Claude Bationo.

La mission a débuté dans la zone de Bobo-Dioulasso avec la visite de bas-fonds aménagés, de fosses fumières, de cordons pierreux, de parcelles de démonstration de cultures fourragères, de poulaillers de démonstration. Elle s’est poursuivie à Djibasso où il y a eu une rencontre avec des groupements de femmes engagées dans la conservation du niébé dans des sacs triple-fond.

Ces braves dames ont dit tout le bien de cette technique aussi simple qu’efficace et qui fait qu’elles n’utilisent plus la cendre pour empêcher les insectes d’attaquer les graines de niébé. Cette façon de faire permet de véritablement sauver le niébé qui posait avant un grand problème de conservation.

A Passakongo, à quelques encablures de Dédougou, nous avons échangé avec un groupement de producteurs qui ont décidé d’expérimenter le système du warrantage sur les spéculations du maïs, du sorgho, du mil et de l’arachide. Avec la Caisse populaire, ils ont warranté 400 sacs de céréales et obtenu un prêt de 1,150 millions de francs CFA en janvier 2013.

Ce crédit leur a permis de scolariser leurs enfants, de payer de la main-d’œuvre pour la récolte du coton, d’entreprendre de petits commerces qui les ont occupés le temps de la saison sèche. C’est l’argent de ces activités génératrices de revenus qui a servi à rembourser le prêt avec un intérêt de 15%.

Lorsque le 6 juin ils ont ouvert le magasin et que chaque producteur pouvait disposer de son stock de céréales, « Passakongo avait des allures de fête comme si on venait de récolter nouvellement. On était content car on sait qu’on a suffisamment à manger et qu’on ne connaîtra pas la période de soudure », nous a précisé le président du groupement.

Pour sa part, Jean Martin Kambiré les a félicités pour le succès de l’opération de warrantage et a promis d’échanger avec la Caisse populaire sur les conditions (taux) du crédit mais aussi sur la nécessité d’inspecter régulièrement le stock de céréales warrantées pour éviter sa détérioration.

A Moundasso, avec le groupement Gnongon dèmè qui exploite le bas-fond rizicole, les échanges ont porté sur la manière d’acquérir les intrants et sur l’autonomisation du groupement.

A Kéra, c’est le dispositif antiérosif déployé dans son champ par Lamoussa Tamini qui a été visité. Il a expliqué tout le bien fondé de ce dispositif qui lui permet de conserver l’humidité dans son champ et de freiner l’érosion. Pour cela, il a rendu hommage aux services techniques de l’Agriculture qui lui ont conseillé d’ériger ces diguettes.

La mission a aussi visité des poulaillers de démonstration à Kari où trois femmes ont bénéficié de l’appui du PAPSA pour concrétiser leur rêve d’élever des poules.

Scindé en trois sous-groupes (agriculture, environnement et élevage), les membres de la mission dans les régions des Hauts-Bassins et de la Boucle du Mouhoun ont pu visiter une vingtaine de localités où ils ont touché du doigt les réalisations et échanger avec les producteurs.

Les localités sillonnées sont : Péni, Kogouera, Saki, Dafinso, Balla, Makognadougou, Bahoun, Dossi, Kari, Nouna, Kari Bonsa, Djibasso, Moundasso, Souri, Kamandena, Kéra, Soin et Koumana, Koukatenga, Passakongo.

Dans ces localités, la mission a pu voir soit des fosses fumières, des bas-fonds, des cordons pierreux, soit des parcelles et des poulaillers de démonstration, l’utilisation des sacs triple-fond et la mise en œuvre du warrantage.

A Bobo-Dioulasso comme à Dédougou, la mission a eu des rencontres avec les partenaires techniques (CRA et structures de l’Agriculture, de l’Environnement et des Ressources animales) du projet.

Claude Bationo de la Banque mondiale, à la fin de cette tournée, a exprimé sa satisfaction de constater que « dans l’ensemble, le projet est en marche, les activités sont enclenchées. Naturellement, on a constaté des insuffisances comme la filière lait qui n’a pas démarré.

Certaines insuffisances sont liées au fait que les financements arrivent parfois en retard mais aussi au faible niveau de structuration des organisations paysannes. Des ajustements s’imposent pour que le projet soit plus efficient ».

Le président de la Chambre régionale d’agriculture (CRA) des Hauts-Bassins (HBS), Faustin Nessan Coulibaly, a salué les appuis que le PAPSA apporte aux CRA en termes de formation, d’équipement et de fonctionnement des structures.

Il a rappelé que « le rôle des CRA, c’est entre autres, de contribuer à désigner les sites et les bénéficiaires des œuvres du projet en concertation avec les services techniques de l’Agriculture, de l’Environnement et des Ressources animales ».

René Ouattara, secrétaire général de la CRA-HBS, a souhaité le renforcement des interactions entre les CRA et le PAPSA qui permettra même aux CRA de contribuer à pérenniser les acquis du PAPSA, même après sa clôture. C’est pour cela qu’il a plaidé pour un appui plus conséquent du PAPSA aux CRA.

Jean Martin Kambiré a noté avec satisfaction que « les réalisations du projet ont eu un impact positif dans la mesure où les bénéficiaires reconnaissent avoir noté une amélioration de leurs productions, de leurs revenus et de leur sécurité alimentaire.

Malgré tout il y a encore des insuffisances que nous allons corriger pour que les bénéficiaires puissent tirer le meilleur profit du projet. C’est du reste l’objectif de cette revue à mi-parcours ».

Source : www.lobservateur.bf

Crédits: AK-Project