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POLITIQUE AGRICOLE AU SENEGAL : Le Cncr veut reprendre en main les destinées agricoles

Les producteurs mobilisés autour du Cadre national de concertation des ruraux (CNCR), ne veulent plus se soumettre aux décisions de l’Etat en matière de politique agricole. Mieux, ils veulent que l’Etat joue désormais le rôle d’ « accompagnateur » plutôt que de « pilote » de l’Agriculture au Sénégal. Les cadres ruraux ont intimé la démarche à suivre, ce week-end, lors de la traditionnelle visite effectuée par la délégation nationale du Cncr dans la région de Kaolack.

Après plusieurs dizaines d’années de politique agricole sans résultats véritables, les producteurs membres du Cncr estiment qu’ « il n’est plus nécessaire de continuer à fonder espoir sur les décisions de l’Etat en matière de politique agricole ». Ils sont aujourd’hui sur le point de réclamer la « restitution » du secteur. Grâce à l’appui de ses partenaires étrangers et nationaux, le Cncr veut s’offrir une agriculture prometteuse voire prospère. C’est du reste les conclusions tirées de la visite de supervision de l’organe central des producteurs, le week-end dernier, dans la région de Kaolack.

Dans le cadre de ses activités ponctuelles et du besoin de dresser un rapport annuel « en toute objectivité », le directoire national des producteurs membres du Cncr, conduit par son président d’honneur du Cncr Mamadou Cissoko et l’actuel président Samba Guèye, avait pour objectif principal de s’enquérir de la situation des paysans, des éleveurs et des pêcheurs avant, au moment et après les récoltes.

Mais de l’avis des acteurs locaux, la situation sur l’ensemble des domaines, constitue « l’une des plus catastrophiques » durant la dernière décennie. Selon les membres du Cncr, la syndicalisation du secteur qui était partie pour être un fer de lance dans le développement de l’agriculture au Sénégal, n’a pas répondu aux attentes du monde rural, car, « seuls les défenseurs de la politique actuelle de l’Etat sont investis à la place des véritables acteurs » capables de promouvoir le système agricole.

Une agriculture quasi morte

Lors de leurs échanges, les producteurs ont indiqué à l’attention de leur directoire que, dans le secteur de l’agriculture, les semences distribuées ne sont jamais parvenues en qualité et quantité suffisantes. Avec la distribution des produits tels que le Toss, les engrais, et autres pesticides, c’est aussi la même remarque qui émane des paysans. Du maïs sans urée, deux (2) sacs d’engrais en moyenne pour un hectare. Cette année-ci, il semble que la situation s’est d’autant plus aggravée, et a conduit à la baisse des rendements. Les producteurs qui parvenaient parfois à disposer de 3 à 4 tonnes à l’hectare n’auraient obtenu que le tiers de la production initiale soit 35 % en valeur proportionnelle. Outre la baisse du barème pluviométrique notée au cours de cette dernière saison hivernale, le foncier constitue aussi l’une des plus difficiles équations à résoudre. Depuis 2004, des pourparlers ont été relativement engagés, mais sans grande satisfaction, car partout dans le monde rural, le manque de superficies arables devient de plus en plus une réalité au moment où les paysans, dans leur écrasante majorité, ne possèdent point de terres et ne disposent non plus guère de papiers administratifs justifiant l’attribution des terres qu’ils exploitent.

L’élevage souffre de tous les maux

Pour ce qui est de l’élevage, les pasteurs de la région de Kaolack sont sur le point de barrer la route aux nombreux troupeaux en provenance des autres régions et dont la présence serait devenue, durant ces dernières années, un fléau. Non seulement cette transhumance massive accentue le phénomène du vol de bétail dans la région, mais contribue de manière significative à l’épuisement du tapis herbacé.

Les différents cheptels par rapport au manque notoire de l’alimentation du bétail profitent des pousses provoquées par l’hivernage pour trouver nourriture, mais avec la présence massive des troupeaux étrangers, l’alimentation des têtes disparaît plutôt que prévu. La subvention en provenance de l’Etat ne parvient pas aux moments choisis, notamment en période de soudure située entre Janvier et Juin.

Arrivée souvent en quantité insuffisante, cette alimentation ne peut couvrir que le tiers de la demande. En marge de cette problématique, les pasteurs ont aussi remis en question la disponibilité des vaccins. Dans la communauté rurale de Latmingué située à environ une vingtaine de Kilomètres au Sud-Ouest de Kaolack, ils ont annoncé que seuls 2000 doses de vaccins anti-dermatoses ont été distribuées, alors qu’en réalité, la communauté rurale couvre plus de 9000 têtes de bovins. Ce qui, naturellement est encore loin de couvrir la demande sociale. Région dépourvue de parcours du bétail limité à l’échelle de ses cheptels, Kaolack, comme en témoignent ses pasteurs, est aussi confrontée au problème de points d’eau.

En saison morte, c’est tout un calvaire pour les éleveurs pour trouver un point d’eau. Sans marre, cours d’eau, les propriétaires et autres conducteurs de troupeaux font parfois plusieurs kilomètres pour trouver un abreuvoir capable de satisfaire leurs animaux.

Pêche encore traditionnelle, cours d’eau de plus en plus pauvres

En matière de pêche, celle qui est encore pratiquée dans la région de Kaolack est totalement traditionnelle. Elle occupe surtout de petits exploitants venus pour la plupart du temps des îles, autres régions en bordure du fleuve « Saloum ». Pour dire que les produits de mer qui inondent souvent les marchés de Kaolack viennent des autres régions et localités.

Les acteurs qui s’investissent aujourd’hui dans l’activité ne se livrent qu’à la revente des produits. Sans port, ni quai de pêche, les nombreux commerçants de produits halieutiques paient leurs caisses auprès des camions frigorifiques à des sommes variant entre 12 et 15.000 FCfa. Les femmes transformatrices de produits, quant à elles, ne voient même pas le poisson et restent des fois plusieurs semaines voire des mois sans grande activité.

Sud Quotidien, via le portail SudOnLine, le 10 janvier 2012, par Abdoulaye FALL

Crédits: AK-Project